• Les Chaussettes Noires

     
    " Tu verras, Aldo, c'est un grand jeune homme brun et fort. Tu n'auras pas à t'y tromper. "
    Cependant, Claude Moine (Eddie/Eddy) eut beaucoup de mal à le reconnaître, et pour cause. Décidément, son copain devait avoir quelque chose dans les yeux...
    De cette rencontre décisive, naquit le groupe que vous connaissez tous aujourd'hui. En effet, Aldo connaissait William et Tony, et son meilleur copain (celui qui a quelque chose dans les yeux !) connaissait Claude Moine qui connaissait Jean-Pierre Chichportich (le premier batteur), travaillant dans la même Compagnie d'Assurance que lui.
    Le contact était pris. Il fallait travailler " dur ", posséder un moyen de transport capable de les apporter au lieu même des répétitions, qui se trouvait être le " Studio Paris Amateur ", et surtout quelqu'un pour les encourager.
    Là, Monsieur Benaïm, père de William, joua un rôle important puisqu'il se chargea d'eux dans les moments particulièrement difficiles des débuts.
    Nous sommes en novembre 1960 et nos cinq compères décident de tenter leur chance. Ils vont se présenter pour auditionner chez Barclay et tombent sur le directeur artistique, Jean Fernandez. La touffe de cheveux qu'Eddie arborait ce jour-là n'était pas faite pour plaire au " talent-scout ". Il leur fit brancher les guitares, mais ne prit pas la chose au sérieux.
    " 1, 2, ...1, 2, 3, 4 ", Eddie chante " Be Bop A Lula ". La sueur coule de son front, ses cheveux se dégonflent et retombent sur ses yeux. Fernandez change de visage. " Stop ! " crie-t-il. " Connaissez-vous autre chose ? ". Nos camarades se regardent les uns les autres et se demandent ce que pense réellement ce Monsieur. Enfin ! " Tant Pis Pour Toi ", " Wild Cat " et " Johnny Be Good " se succèdent à un rythme surprenant - vraiment, ils donnaient le meilleur d'eux-mêmes ce jour-là.
    Le lendemain, rendez-vous avec Monsieur Barclay lui-même. On signe les contrats, pour trois ans, s'il vous plaît ! Les répétitions commencèrent aussitôt après. " On en avait besoin ", affirma William " au départ, nous étions tous raides comme des bouts de bois. Un chorégraphe américain, Scott Douglas, nous fit travailler un jeu de scène que nous avons repris en main ensuite nous-mêmes ".
    Fin décembre, le premier disque est terminé. Une particularité à noter, ils enregistrèrent les quatre titres (" Tu Parles Trop ", " Si Seulement ", " Be Bop A Lula " et " Tant Pis Pour Toi " Barclay 70.369) dans la même séance, record rarement répété par d'autres artistes par la suite. Et quelle séance mémorable, on n'arrivait pas à mettre les morceaux en boîte. Heureusement, Barclay est arrivé et a pris en main les commandes. A partir de là, tout se passa à merveille, les quatre titres défilèrent sans difficultés. Ils étaient à la fois surpris et très fiers de leur premier travail.
    Le problème le plus difficile cependant, restait le choix d'un nom. Lors de leurs répétitions au Studio d'Amateurs, on les appelait " Les Daners, avec Eddie Dane ". Mais, Fernandez leur dit : " Vous vous appelerez Les Cinq Rock ". Tout le monde est d'accord et s'en retourne chez soi. On tourne le bouton de la " T.S.F. ", " Be Bop A Lula " passe pour la première fois sur les ondes. Le présentateur annonce : " Et vous venez d'entendre le premier groupe français de rock n'roll, LES CHAUSSETTES NOIRES ". Chacun chez soi, les " Cinq Rock " bondissent sur leur siège : " C'est ridicule, qu'est-ce que cette horreur ? ".
    Ce nom leur semblait vraiment ridicule, et ils ne s'imaginaient guère qu'il allait devenir le point de départ de toute leur aventure.
    Février 1961, leur deuxième super 45 tours sort sur le marché, il comprend un titre qui restera le " standart " incontournable pendant près d'un an : " DANIELA ".
    Fin février 1961, Johnny Hallyday passait en grande vedette du Premier Festival de Rock n'roll Français donné au Palais des Sports de Paris. Nos cinq " Chaussettes " étaient là et partageaient une " peur bleue ", d'affronter leur public. C'était la première fois qu'ils éprouvaient un tel recul devant des jeunes. Ces derniers étaient si nombreux, et à cette époque, l'hystérie était une de leurs meilleures armes. Ce jour-là, ils interprétèrent " Tu Parles Trop ", " Tant Pis Pour Toi ", " Eddie Sois Bon ", " Daniela ", " Si Seulement ", et " Be Bop A Lula ".
    Avril 1961. Jean Nohain les engage pour " tourner " dans un spectacle familial qui fit le tour de la France. Ils passaient en " américaine " et interprétaient dix morceaux. Seulement, leur jeu de scène était plutôt trop sobre. Leur troisième disque paraît avec " Hey Pony " pour principal titre.
    Mai 1961. A partir de ce moment-là, ils ne vont plus arrêter de faire des galas. Ceux-ci les conduisent à Bruxelles les 20 et 21 et à Genève le 31.
    Juin 1961. Deuxième grand frisson de leur vie. Deuxième Festival de Rock'n'roll au Palais des Sports où ils passent en " grandes vedettes ". Ce soir-là, ils comprirent le sens de leur carrière. " Nous nous sentions beaucoup plus sûrs de nous-même, car nous comprenions que les jeunes nous aimaient ". Cependant, Richard Anthony leur fit de la peine. Les impresarios de ce dernier l'ayant forcé à monter sur la scène alors qu'il n'était pas prévu au programme, firent si bien qu'un groupe d'anti-fans se déchaînèrent et lui lancèrent des tessons de bouteilles en pleine figure.
    Juillet-Août 1961. Les fameuses tournées d'été sur la Côte d'Azur. " Fameuse " pour ceux qui avaient engagé les " Chaussettes ". En effet, les chaussettes noires qui auparavant étaient très communes devinrent très à la mode. Leur cote augmentait terriblement et même les personnes d'un certain âge commençaient à en porter. En fin de compte, il faut se dire qu'ils ne gagnèrent quasiment rien à faire cette tournée, qui les amena à travailler avec Vince Taylor. A son sujet, leurs avis étaient partagés : très bon sur scène, reproches adressés à son costume trop copié sur celui de Gene Vincent et surtout à cause de leur rencontre. Celle-ci eut lieu dans une pizzeria. De papotage en palabre, Vince leur révèle que Gene Vincent copiait tout sur lui. Toutes les Chaussettes étaient tombés dans le panneau, sauf Eddie qui réussit, mais beaucoup plus tard (janvier 1962) grâce à Disco Revue, à montrer à ses copains que Gene Vincent portait le même habillement depuis 1958.
    Septembre 1961. " Dactylo Rock " et " Madame, Madame " composent leur quatrième disque. Ils reprennent les tournées " Stemm " (les fameuses chaussettes à l'origine du nom du groupe) et commencent à gagner de l'argent.
    En novembre 1961, ils passent à l'Olympia avec Helen Shapiro et Vince Taylor. " Le Twist " fait son apparition.
    Décembre 1961. Ils passent en " affiche " à l'A.B.C., et à cette occasion, Disco Revue leur consacre le N°5 du 2 décembre 1961. Particularité : des copains du Golf Drouot portaient des maillots des Chaussettes et faisaient la police eux-même dans la scène. En réalité, ils n'eurent pas à la faire.
    La bande à Eddie enregistre un disque de noël où ils figurent tout les cinq sur la pochette déguisés en pères Noël.
    Janvier-février 1962. Nouvelles tournées française. La bourse de la popularité les protège et les lecteurs de Disco Revue votent Eddie Mitchell, meilleur chanteur de rock français avec un maximum de voix, tandis que Les Chaussettes Noires sont reconnus deuxième groupe mondial de rock'n'roll.
    Mars 1962. Coup fatal pour le groupe. Eddie part au service ! Il est incorporé à Monthléry et sert l'Armée Française comme tous ses compatriotes.
    Le twist a gagné " Les Chaussettes Noires " et c'est avec le renfort du saxo, Mick, qu'ils enregistrent " Peppermint Twist " et " Volage ", " Hey Let's Twist ", " Roly Poly ".
    Mai 1962. Leur deux millionième disque est sorti et quel disque ! C'est un album 33 tours, luxueux comprenant douze de leurs meilleurs titres du moment; un astucieux montage et collage permet de les avoir sur sa table et en relief. Un disque souple en plastique est joint sur lequel on peut entendre chaque " Chaussette " remercier à sa façon les milliers de copains qui les aidèrent à gagner leur place.
    Juin 1962. Ils enregistrent " Le Twist Du Canotier " avec Maurice Chevalier.
    A partir de juillet 1962, " Les Chaussettes Noires " se divisent en deux fois pour effectuer le Service Militaire. Tout d'abord, Aldo, Mick et Tony début juillet, tandis que William et Jean-Pierre partiraient en septembre. Malheureusement, cela entraînera également le déclin du groupe. A noter qu'au départ de Tony, c'est son frère Vic Laurens, à ce moment là libre de tout engagement après la séparation des " Vautours " dont il était le chanteur, qui le remplacera durant un mois lors de la tournée en Algérie.
    Le désir d'Eddie d'entamer une carrière solo à partir de 1963, obligeront William Benaïm et Tony d'Arpa à lui intenter une action en justice pour rupture de contrat qu'ils perdront dans la pénibilité d'une longue procédure.
    Sans Eddie, le groupe change de style et adopte le profile musical au détriment d'un nouveau chanteur, et Paul Benaïm remplacera Tony d'Arpa à la rythmique.
    Ils enregistrent deux super 45 tours avec en majeur partie des adaptations anglaises avant de se séparer fin 1963 après la fin de leur contrat chez Barclay.
    Par la suite, Gilbert Bastelica, Aldo Martinez et Michel Gaucher feront une continuité dans la carrière solo d'Eddy Mitchell.

    _________________________________________Corval & JC B
     
     
     
     

  • Commentaires

    1
    EMC
    Vendredi 2 Juillet 2010 à 14:26
    Bonjour,

    J'ai bien aimé votre article sur Les Chaussettes Noires
    BRAVO
    Jacques Assolen
    Président de l'EDDY MITCHELL'S CLUB

    EDDY MITCHELL'S CLUB
    Fondé en 1982
    c/o Jacques Assolen
    BP 543
    13492 Marseille Cedex 04
    eddymitchellsclub@yahoo.fr
    Agréé par Eddy Mitchell
    http://www.eddymitchellsclub.com/
    2
    Corval Profil de Corval
    Vendredi 2 Juillet 2010 à 15:13
    Bonjour et merci.
    J'apprécie tout particulièrement le compliment venant de votre part Président.
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